Eugeen Van Mieghem
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En tant que « reporter acharné », Eugeen Van Mieghem s’est attaché à représenter l’effervescence d’Anvers au début du XXe siècle. Dessinateur et peintre infatigable des anonymes, il met en lumière le travail ardu des dockers et des ouvrières du port. Il croque également des mendiants, des vagabonds et des prostituées, donnant ainsi un visage à la marginalité de cette ville portuaire. Il observe le passage de migrants juifs, souvent mal vêtus, en route pour l'Amérique. Son regard s’étend aussi aux gestes du quotidien de sa femme et de son enfant, à la bourgeoisie animant les brasseries et les salles de fête, à l’industrialisation du port moderne, ainsi qu’aux ravages causés par la Première Guerre mondiale.
L'innovation au pastel
Il porte un regard aussi attentif sur le monde extérieur que sur le monde intérieur, sur les sommets comme sur les bas-fonds de l’échelle sociale, sur les plaisirs comme sur le labeur, sur l’amour comme sur l’horreur, embrassant tout ce qui croise son champ de vision. Son œuvre reflète intensément le « présent » qu’il habite. Van Mieghem est le sismographe de son époque. Bien qu’il soit pleinement conscient des tendances artistiques de son temps, il n’a jamais cédé à leur attrait. Il est resté un esprit solitaire, un Einzelgänger.
À l’occasion d’une importante donation de la Fondation Eugeen Van Mieghem, le musée met en lumière les nombreuses facettes de l’œuvre de cet artiste anversois au caractère affirmé et à la profonde sensibilité sociale. En s’appuyant sur des prêts issus de collections publiques et privées, le conservateur Eric Rinckhout souligne l'impact des pastels et des dessins saisissants de Van Mieghem.
Leysstraat au crépuscule - Eugeen Van Mieghem, 1912, collection privée
En cale sèche - Eugeen Van Mieghem, ca 1912, collection privée
Carnets de croquis faits maison
Van Mieghem est un bricoleur. L’argent manque, alors il assemble ses carnets de croquis avec les matériaux disponibles : lettres de condoléances, invitations, télégrammes du port. Parfois aussi minuscules qu’une boîte d’allumettes, ils doivent tenir dans la paume de sa main. Pour cette exposition, ces carnets sortent pour la première fois, bien souvent, des boîtes et tiroirs de collectionneurs privés. Ses milliers de dessins et esquisses constituent une véritable archive visuelle, un journal intime et spontané à déchiffrer.
Panorama sur papier
Le conservateur Eric Rinckhout s’appuie également sur la précieuse donation de la Fondation Eugeen Van Mieghem au KMSKA. Cette contribution offre un vaste panorama des thèmes chers à l’artiste : la ville en perpétuel mouvement, la souffrance humaine durant la Première Guerre mondiale, le destin des migrants juifs en route vers l’Amérique, ainsi que la vie quotidienne des femmes et des enfants. Avec un regard à la fois amusé et acéré, Van Mieghem observe ce monde en mutation, témoin lucide et critique de son époque.
Van Mieghem était sans doute conscient de l’effervescence artistique qui marquait le début du XXe siècle, avec l’émergence de nouveaux courants. Pourtant, ces évolutions n’ont pas influencé son propre parcours. Fidèle à son engagement social et à son regard perçant, il demeure ancré dans un réalisme vibrant, porté par une insatiable passion du dessin. Il observe, capte et esquisse avec rapidité, des couleurs éclatantes et une franchise sans détour.
Le conservateur et écrivain Eric Rinckhout prépare actuellement une biographie d'Eugeen Van Mieghem, dont la publication est prévue pour fin septembre 2025 chez Pelckmans. L'ouvrage sera présenté au KMSKA à cette occasion.
Informations pratiques
- Au cabinet d'arts graphiques, au troisième étage.
- L'accès à l'exposition est inclus dans le billet d'entrée au musée. Il n'est pas nécessaire de réserver un créneau horaire pour y accéder.
