Dit is in een notendop mijn levensverhaal
Voici en abrégé l’histoire de ma vie.
Né en 1860 à Ostende [doorstreept : en 1860], alors villette encerclée de remparts du
plus beau vert et de fossés trop salés par la mer.
Mon père, anglais solide, né à Bruxelles en 1835, ma mère
Ostendaise finement espagnolée.
Ma mère me sustentait par force pralines et dragées
et une bonne tante m’insufflait du lait trop sucré,
la raison, l’instruction de mon père, homme supérieur, et ses grosses bottes
m’inspiraient peur et terreur.
Au collège « Notre dame, » des maîtres bienveillants m’
éduquèrent en douceur.
Le goût de la peinture me vint vers les 13 ans,
alors deux vieux peintres d’Ostende : Van Cuyck et Dubar
saumurés et huileux m’initièrent professoralement aux aux (sic) poncifs
des métiers, décevant de leur [doorstreept : morne] métier morne et borné.
Mais à quinze ans je peins d’après nature des vues des
environs d’Ostende, ces petites œuvres sans prétention peintes au pétrole sur carton
rose me charment encore.
,2
[doorstreept : Et me voici en 1877] à 17 ans, j’entre à l’académie de Bruxelles, admis d’emblée
au cour de peinture d’après nature sous les férules
de trois professeurs [doorstreept : sans] discordant leurs accents réservant leurs accords ; Joseph
Stallaert, Alexandre Robert, Jef van Severdonck, un directeur
important et bouillant Jean Portaels, bien en cour et fort cité, tranchait impérativement les questions d’art
des compagnons d’étude : Khnopff, Duyck, Evrard, Crespin
et quelques mauvais garçons bridés, entravés, travaillant
sous l’ennui et sans amour.
Dès mon entrée un gros malentendu se dessine,
ou m’ordonne de peindre d’après un plâtre vierge,
le buste [doorstreept : d’Auguste] d’Octave le plus [doorstreept : romain] auguste des Césars.
Ce plâtre neigeux ni horripile, j’en fait de la chair de poule
rose et vive et je roussi la chevelure au grand
émoi des élèves, émoi suivi de brimades, grimaces et horions,
devant mon audace les professeurs interdits n’insistèrent
point et par la suite je peignis en liberté d’après
modèle vivant.
Pour apprendre à respecter l’art académique je dessine
et essuie le soir tous les plâtres et j’enlève le second prix
de dessin d’après la tête antique.
Ainsi, durant trois années, je dessinais le soir d’après
l’antique et je peignais le jour la figure d’après
nature, et la nuit je compose ou géographie mes rêves. En concours de composition avant tout m’
intéressent de là datent quelques œuvres encore
bien vues de nos jours telles.
,3 3
Le retour du Calvaire, Judas lançant l’argent dans le temple
La danse des nymphes. Judith et Holopherne, La mort de
Jézabel, Moins exaltés réclamant le corps du théologien
- ovis malgré l’opposition de l’évêque Friton ou Friston,
cette composition gardée longtemps par Portaels, [doorstreept : dit] le plus éclectique
des professeurs, fit beau tapage.
Âlos, je peins une humble servante « La femme au nez retroussé »
actuellement au musée d’Anvers. Le spectacle de la rue
aussi me préoccupe, mes appétits picturaux se développent,
Je croque des passants, des pommes, des volailles, des flacon bleus,
tous les procédés sont bons, [doorstreept : le] crayon, [doorstreept : l’] aquarelle, [doorstreept : le] gouache et
[doorstreept : dame] gosse lumière entre en [doorstreept : dame] sautillant culbutant tabler, déformant verres et bouteilles brisant vitres et vaisselle
Rentré à Ostende dans la boutique de mes parents, je peins
des chinoiseries et mes portraits. En 1880, le Lampiste.
En 1881, le portrait de mon père et musique russe en 1882 le portrait de ma mère,
œuvres actuellement au musée de Bruxelles. La danse
en détresse, au musée du Jeu de Paume à Paris.
En 1881, je débute à la « Chrysalide » où j’expose ‘La coloriste’,
puis à l’Essor, où l’on refuse ‘La Mangeuse d’huîtres,’
actuellement bien assise au musée d’Anvers.
En 1883, le masque me touche à fond. « Les masques
scandalisés » musée de Bruxelles, font leur trouée
poussent leurs cols allument leur nez étonné, allongé.
En 1884, Vogels mégotant dans son jus, alors admirateur de Maris le hollandais, surpris et
influencé par mes notes et mes accents s’emballe de
ma peinture, nous exposons des paysages de plein air sous les huées
des confrères du cercle artistique de Bruxelles.
,4
En 1884, fondation du Cercle des Vingt, milieux étiqueté, révolutionnaire,
exposé à l’hostilité académique. Là durant dix années des confrères balayés par
mes masques me [doorstreept : firent mille] causèrent peines sur peines.
Le feu s’aggrave encore à la ‘Libre Esthétique’ salon
accueillant où [doorstreept : les peintres de mains] des pointillistes bizarres évoluant en sourdine, s’infiltrent à
souhait, là des musicants mangeurs de morceaux,
suspendus à leur cordes racclent des nerfs de chattes
crèvent de tymbales, éventrent des caisses
ou bombardent des caissons à coups de bombardons.
Mais j’ignore encore le grand Paris de mes vrais frères de lutte.
Dès 1885 des soleils me préoccupent, j’exécute plusieurs dessins… Les auréoles du Christ
ou les sensibilités de la lumière. En 1886, Les enfants à la toilette. En 1187, Le Christ secou-
-rant Saint Antoine. En 1888, L’entrée du Christ à Bruxelles.
Œuvre solide jugée redoutable, [doorstreept : aux yeux morts] par nos
Cézannistes déconfits à l’œil fané reflétant des chandelles.
Maigriottes, amincies, alanguies
Cependant, les œuvres s’accumulent des hommes du sang pur, touchés
aux sens, se dressent en défenseurs : Edmond Picard, Verhaeren,
Demolder, Desombieaux, Hellens, Le Roy.
Quelques rares et francs acheteurs se dévouent, des audaces se font
jour : Ernest Rousseau, Robert Goldschmidt, Edgard Picard,
A. Lambotte et Emael Sas Van Haelen.
Mais nos politiciens et classeurs d’artistes chantèrent à l’unis-
-son » Ensor peut encore attendre.
Alors, dégoûté des soutiens illusoires, l’esprit charnel de la
femme me subjugue un moment. Ah ! la femme et son
masque de char, de chair vive devenu pour de bon masque de
carton. Enfin François Franck vint armé de pied en cap porn me
sauver et de Broqueville, l’exquis raffiné, ranima mes forces en
pansant mes blessures. J’entends saluer les deux pôles puissants,
protecteurs et rivaux Et croquez le grand français matiné de
flamand me défends largement. Magnifique trinité-trio
de mécènes flamboyants.
,5 5
Depuis, les défensuers masculins-féminins abondent garni-
-ssant à qui mieux-mieux les degrés espacés l’echelle menant au
Paradis des peintres de la vie. Encore et toujours croquez le
sympathique, De Monzie, Herriot, Destrée, Piérard,
Mesdames Lambotte, Hertoge, Steyns, Bernières, Gevers, Demoulière
et la sirène et ma petite chinoise me couvrent de pétales blancs
jeunes ou roses.
Des intérest s’éveillent des peintres, des musiciens, des écrivains
bataillent en cadence et suprême plaisir dame musique daigne
me sourire et les gammes d’amour accentuent mes rares joies.
Rinskopf, Sanciani
Gilson De Boeck, Vriamont, Brusselmans, Lyr, Gaillard, Chapel
Peelemans, Tellier, Thiébaut, de Sutter, Lauwereyns,
de Vlieger, Mouqué, Alpaerts, Bastin me proclament musicien.
Des musiciennes charmantes executent mes couplets : Steyns, Flour, Thauvoye,
de Kesel, Nelly Jones Zlyka etc; etc.
Des écrivains, des poètes, Fleischman, Edmond Jaloux, Teugels, Steyns,
Leirens, Conrardy, Van Offel, Raemaekers, De Ridder, Marlier Van de
-putte, de Ghelderode, Dupierreux, Bernard, André Chite de Marchi, Sepage,
Van Puyvelde, Cornette, Muls, Laes, Lambotte, Lebeer Delen, Sabbe,
Haesaerts, Van de Velde, Crommelinck;
Et les artistes jeunes ou vieux : Vervisch, Ledel, Salz van Paemel,
Van Damme, de Valeriola etc etc forment une légion dévouée et
tous les peintres d’Ostende vont de l’avant vers le soleil
[doorstreept : nouveaux] levant.
Et le bon docteur Cerf, peintre manqué, Soulage les misères
des confrères surmenés, fatigué, [doorstreept : victimes de] crispés par la crise
Stimulés par les Francks des mécènes, surtout anversois, interviennent : Mistkern Jussiant,
Gèvers, Fester, de Lange, L’Heureux, Speth, Oesterieth,
Boorm, Van den Bosch, Van Overloop, Fischer, [doorstreept : etc; etc]
Snauwaertn Joye, Trussel, Max Hallet, je ne puis les citer
tous.
,6
Une baronnie bien venue me touche au flanc,
elle me donne force pour sauver nos rochers, nos
bois, nos dunes, nos bassins.
Et toujours guerre aux vandales, sus aux démolisseurs, aux
ruineurs de nos sites les plus beaux.
Sauvons Bruxelles et ses panoramas incomparables
gravement menacés, par embellisseurs, donquichottés, désordonnés, demuse-
-lés, désaxés à l’accès.
Chers peintres abandonnons nous sans tarder aux purs
baisers de l’air, aux bienfaits de la mer, nourrissons
nos pensées d’abord, nos corps ensuite, goritons,
les fruits de l’espace, le parfum et les sons des couleurs ,
sublimons nos idées.
Et crions. Oui, nos serons grands, nous seront
forts et crions plus fort nos femmes seront plus belles encor.
[doorstreept : Jeunes amis mes empères je veux renouveler] hier staan nog een aantal onduidelijke aantekeningen in potlood rond, allemaal doorstreept.
Dame peinture toujours jeune. Je vous donne mon
cœur. Je vous donne mon corps. Vive vous ! Je vous aime !
James Ensor
Ostende, 21 juin 1934
Over dit archiefstuk
Identificatie
- Objecttypehandschrift
- TitelDit is in een notendop mijn levensverhaal
- Datum21/06/1934
- RelatiesAuteur: Ensor, James
Ensor, James Frederic, Haegheman, Marie Cathérine, Haegheman, Maria Ludovica, Dubar, Edouard, Cuyck, van, Michel, Koninklijke Academie voor Schone Kunsten [Brussel], Stallaert, Jozef, Robert, Alexandre, Severdonck, van, Joseph, Portaels, Jan, Khnopff, Fernand, Duyck, Edouard, Evrard, Henri, Crespin, Adolphe, Koninklijk Museum voor Schone Kunsten [Antwerpen], Koninklijke Musea voor Schone Kunsten van België, Musée du Jeu de Paume [Parijs (F)], La Chrysalide, L’Essor, Vogels, Guillaume, Cercle Artistique et Littéraire, Les Vingt, La Libre Esthétique, Picard, Edmond, Verhaeren, Emile, Demolder, Eugène, Ombiaux, des, Maurice, Hellens, Franz, Roy, le, Grégoire, Rousseau, Ernest, Goldschmidt, Robert, Picard, Edgar, Lambotte, Albin, Emaël, Haelen, van, François, Franck, François, Broqueville, de, Athanase, Croquez, Albert, Monzie, de, Anatole, Herriot, Edouard, Destrée, Jules, Piérard, Louis, Lambotte-Protin, Emma, Hertoge, Blanche, Steyns, Elsa, Bernières, Claude, Gevers, Marie, Boogaerts, Augusta, Daveluy, Alexandrine, Rinskopf, Léon, Lanciani, Pietro, Gilson, Paul, Boeck, de, August, Vriamont, Joris, Brusselmans, Michel, Lyr, René, Gaillard, François, Toussaint de Sutter, Jules, Mouqué, Aimé, Alpaerts, Flor, Bastin, Fernand, Flour, Mireille, Kesel, de, Jacqueline, Fleischman, Theo, Jaloux, Edmond, Teugels, Jean, Leirens, Charles, Conrardy, Charles, Ridder, de, André, Marlier, Georges, Vandeputte, Henri, Ghelderode, de, Michel, Dupierreux, Richard, Lhote, André, Puyvelde, van, Leo, Delen, Ary J.J., Sabbe, Maurits, Crommelynck, Fernand, Vervisch, Jean, Ledel, Dolf, Salz, Sam, Paemel, van, Jules, Damme, van, Suzanne, Valériola, de, Edmond, Franck, Louis, Franck, Charles, Mistler, Enrique, Jussiant, Cléomir, Gevers, Max, Fester, Henri, Fester, Robert, Lange, de, Joseph, Osterrieth, Max, Overloop, van, Jef, Snauwaert, Camille, Joye, Auguste, Trüssel, Fritz, Onze-Lieve-Vrouwecollege Oostende: Oostende, Hallet, Max - PlaatsOostende
- Onderwerpbiografieën
Kenmerken
- Genrebeschouwend proza
- Dragerpapier [vezelproduct]
- schrijfmateriaalpennen
- TaalFrans
- Digitaal afbeeldingsnummerA4125
- CopyrightPublic domain
Aantekeningen
- Annotatie-InhoudEnsor vermeld volgende namen die niet geïdentificeerd zijn: Maris le hollandais, Mvr. Demonlière, Peelemans, Tellier, Thiébaut, Lauwereyns, De Vlieger, Thauvoye, Nelly Jones, Zlyka, Van Offel, Raemaekers, bernard, de Marchi, Lepage, Cornette, Muls, Laes, Lebeer, Haesaerts, Van de Velde, Speth, Boorm, Van den Bosch, Fischer.
Locatie
- MagazijnlocatieKMSKA archiefdepot
- Deel van archief
Extra gegevens
- Gerelateerde kunstwerken
- Gerelateerde publicaties
- IIIF manifesthttps://iiif.kmska.be/iiif/3/34980/manifest.json
- Record identifier